SOLUTIONS DURABLES I Ecogestes

Emprunter, c’est économiser
On le fait bien, et depuis des lustres, pour les livres. Pourquoi pas pour une perceuse ou une robe de soirée? Emprunter plutôt qu’acheter est une manière de préserver l’environnement et votre porte-monnaie.
SYLVIE ULMANN
En Suisse, des bibliothèques d’un nouveau genre voient le jour un peu partout: au lieu de livres, elles proposent d’emprunter des objets. Elles réalisent ainsi un vieux rêve qui séduit autant les écologistes convaincus que les adeptes de Marie Kondo, championne toutes catégories du désencombrement: mutualiser l’utilisation de ces articles dont on ne se sert que sporadiquement, de la machine à pain au canot pneumatique ou à la tente de camping. Vous y dénicherez presque tout ce dont vous pouvez rêver, à l’exception des skis et autres chaussures de randonnée, qui devraient être proposés en de trop nombreuses tailles, ou des jeux et jouets, territoire des ludothèques. Pour accéder à cette caverne d’Ali Baba d’un nouveau genre, il suffit de s’inscrire puis de s’acquitter d’un abonnement au coût modique. Une fois que vous avez trouvé votre bonheur, il ne vous reste qu’à réserver l’article en question, puis à venir le récupérer.
PARTOUT EN SUISSE ROMANDE
A Lausanne, la bibliothèque d’objets La Manivelle a vu le jour en 2019. Le Covid a beau être passé par là, il n’a pas découragé ses usagers. «Nous sommes nombreux à avoir une perceuse chez nous. Mais combien de fois l’utilisons-nous chaque année?» lance Valentin Augsburger, de La Manivelle Lausanne. Idem pour la machine à jus de fruits, acquise dans la foulée d’une bonne résolution du 1er de l’an, employée… une poignée de semaines. Si beaucoup des articles empruntables dans ces succursales de prêt aux quatre coins de la Suisse romande proviennent de dons, La Manivelle lausannoise «dispose depuis peu d’un petit budget permettant de réparer ou d’acheter, en priorisant le seconde main, ce qui manque en fonction des demandes ou des propositions des usagères et usagers», explique Valentin Augsburger.
Présente à Genève et à Lausanne – où l’association est d’ailleurs en quête de locaux après la fermeture de son local sous-gare –, La Manivelle vient d’ouvrir à Nyon. Yverdon-les-Bains a sa Tatouthèque, Neuchâtel sa Trucothèque et Fribourg sa Case à Stock. Dans le val de Bagnes, les bibliothèques et ludothèques ont également mis en place une extension consacrée aux objets. Et le principe existe aussi pour les vêtements. A Genève, Lesptitslouent habille les 0 à 3 ans, tandis que chez Sharealook, à Zurich, on peut louer une robe de mariée contre une centaine de francs par jour ou se la jouer Le Diable s’habille en Prada en chaussant une paire d’escarpins de la fameuse marque italienne pour 15 francs – plus les frais d’abonnement.
DE L’UTILITÉ D’UNE PLATEFORME DE GESTION DES EMPRUNTS
Ces «objethèques» ont l’avantage d’être organisées de manière professionnelle par rapport à d’autres initiatives de prêts locales, type Pumpipumpe. Cette dernière propose, moyennant 7 francs, une plaquette d’autocollants à poser sur sa sonnette, figurant les articles dont on dispose et que l’on est prêt à partager. Problème: tout le monde a besoin de sa tondeuse le week-end. Et, bien qu’un site internet répertorie prêteurs et objets prêtés, il n’est pas toujours facile d’entrer en contact avec les propriétaires. «D’où l’utilité d’un site permettant aux usagers de réserver le matériel souhaité et de s’organiser», souligne Valentin Augsburger. Il rêve de voir ces bibliothèques d’un nouveau genre se multiplier: «Il pourrait y en avoir une par quartier; les coopératives d’habitation pourraient même y consacrer un local», s’enthousiasme-t-il.
ILLUSTRATION: ADOBE STOCK